Emmanuel écrit dans Le crime du 4 février :

Non, ce traité n'est pas simplifié. Il est même délibérément obscure, de façon à cacher aux électeurs le fait que l'histoire repasse les plats qu'ils avaient cru pouvoir renvoyer. La Commission européenne le reconnaissait d'ailleurs ouvertement en juillet dernier, avec une désarmante franchise qui ressemblait fort à du dépit.

Le traité de Lisbonne est quasiment identique au traité de Chamallières, personne ne le conteste. Et donc, logiquement, il s'offusque de la différence de traitement entre les deux, et ce, à propos d'un point fondamental :

Mais, précisement parce que je suis viscéralement attaché à cet acquis communautaire, je crois que l'intégration européenne ne peut pas se faire contre, ou sans les peuples. Que l'époque où l'on pouvait défendre une forme de despotisme éclairé pour poser les fondations d'une paix durable en Europe est depuis longtemps révolue. Et que refuser au peuple français l'occasion de se prononcer sur le traité modificatif est plus qu'un crime de lèse-souveraineté : c'est une faute politique, qui aggravera la crise européenne au lieu de la résorber.

C'est l'antienne du peuple souverain, de la δημοκρατία, dans laquelle les représentants élus ont ce pouvoir... de représentation, dans les limites fixées par les lois, et en premier lieu par la Constitution. Et la Constitution peut effectivement être modifiée par les représentants du peuple, même si, en l'espèce, les représentants s'apprêtent à le faire à l'opposé de ce qu'avait décidé le peuple il y a un peu plus de deux ans. On a les représentants qu'on mérite. A cela, on rétorque souvent (dans les commentaires du dit article) :

N'oublions pas que les députés et sénateurs sont les élus du peuple, et a ce sens ont autant de légitimité que lui a approuver ou non un texte.

Légitimité ? Exactement, légitimité, c'est-à-dire, conformément au droit. D'ailleurs, n'est-ce-pas ce que réclame l'un des plus mauvais avocat de France, notre président à tous, Sarkozy :

Mais les français, il m'ont élu sur un programme. Pardonnez-moi, M'am' chabot mais je vais pas m'excuser de respecter mon programme. Parce que c'est aussi respecter les français.

Un bien bel exemple de logique : ils m'ont élu, sur un programme, donc ils veulent tout mon programme et rien que mon programme. La représentation du peuple devient par un tour de passe-passe le représentant du peuple, quitte à devenir le VRP du peuple (bien piètre VRP d'ailleurs, quand on voit ce qu'il rapporte à ses actionnaires). La question qui demeure après toutes ces bonnes intentions : que va-t-on faire de ce foutu peuple ? 60 millions de personnes se sont réincarnées dans Adam, l'homme premier, maître des fruits défendus : Rolex, Pognon et Rayban, le fameux RPR. L'esprit du peuple s'est cristallisé en une pensée unique, la pensée du PP, du Programme Présidentiel. En même temps, cet aboutissement est tout à fait logique, la patronne du MEDEF, Laurence Parisot, ne sait pas ce qu'est un sondage mais en dirige un institut, et notre président qui a construit son programme sur des sondages n'a retenu qu'une chose : le sondage est représentatif donc il est suffisant. Il l'a appliqué à lui-même, mais il ne lui est resté que la suffisance.