- Justin Frankel, créateur de Winamp, qui a donné sa démission
- Brennan Underwood, responsable du projet Wasabi (au cœur de Winamp 3, et à la base de la bibliothèque de médias entre autre dans Winamp 5), licencié par AOL
- Bryan Geiss, développeur indépendant du plug-in de visualisation le plus connu qui avait été embauché par Nullsoft, licencié par AOL
Si un logiciel a bien contribué à l'essor du MP3, c'est bien Winamp. Stable, léger, rapide, personnalisable, il a mené la voie. Des concurrents qui se sont lancés, peux survivent aujourd'hui. Justin Frankel avait monté l'entreprise Nullsoft, qu'il a revendu à AOL il y a quelques années, et c'est sans doute les différends entre les visions du jeune développeur/entrepreneur et du mastodonde corporatiste qui ont mené à sa démission. Winamp 5 s'est fait sous la direction de Frankel, et il fonctionne décidément très bien. Au fur et à mesure des pérégrinations, je tombe sur ces chiffres de fin 2003 : selon Nielsen/NetRatings, Winamp avait à ce moment là 5,5 millions d'utilisateurs, Windows Media Player 43,1 millions, Real Player 26 millions et QuickTime 13,5 millions. J'ai été choqué. Windows Media Player en tête, cette bouse, laide, non ergonomique, qui installe silencieusement ses codecs sans demander l'accord, sur laquelle les mises à jour les plus importantes sont pour boucher les trous de sécurité. Je ne peux même pas parler de ses performances abyssales vu qu'il n'est pas installé sur ma machine. Je dis "pas", mais il faudrait que je dise "plus". Car c'est là que le bât blesse.
Comment amener les gens à utiliser ses produits ? Ici un tableau rapide qui résume la situation :
Produit | Performance | Interface | Captation | Distribution | Notes |
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Windows Media Player | - | -- | +++ | +++ | Distribué avec Windows, mises à jour par Windows Update, utilisation forcée par plusieurs maisons de disques basant leur stratégie anti-consommateur sur l'utilisation exclusive de la gestion des droits numériques MicroSoft. Mises à jours forcées dues à l'évolution des formats propriétaires non supportés par les anciennes versions. L'unique innovation du logiciel fut d'envoyer automatiquement à Microsoft les informations sur les titres en cours d'écoute de façon nominative. Cette "fonctionnalité" a été supprimée depuis. |
Real Player | - | - | +++ | + | Distribué avec certains balladeurs MP3 et historiquement avec le navigateur Web Netscape. Sa force repose sur ses formats propriétaires, depuis supplantés en terme d'utilisation par ceux de MicroSoft. RealPlayer One fut l'occasion de sortir une des interfaces utilisateurs les plus nases de ces dernières années. Le téléchargement de la version gratuite a très souvent été un parcours du combattant dans la forêt Realienne. |
QuickTime (et iTunes maintenant) | -- | -- | ++ | ++ | Je ne parle ici que des versions Windows, la part de marché des Macs étant trop faible. Portages relativement mal faits de leurs versions Mac, dont seule la gloutonnerie en terme de mémoire et d'utilisation CPU les fait sortir du lot. Apple impose par contre en force sa mainmise sur les bandes-annonces de cinéma, et se sert de l'iPod comme cheval de Troie. Installer QuickTime sous Windows aujourd'hui mène en plus à l'installation d'un service Windows pour l'iPod, même si vous n'en avez pas. |
Winamp | + | + | o | o | Le plus léger de tous, le plus stable, le moins envahissant. Pas de format strictement propriétaire associé (NSV est suffisemment documenté, le reste est fourni), lit tous les formats supportés par DirectShow en plus de ses plugins internes. |
Au final, le logiciel le plus efficace est sous-utilisé. Parce que Windows Media Player est meilleur ? Non, il combine tout simplement les deux facteurs forces : distribution forcée et formats propriétaires. La distribution forcée fait qu'on n'est pas tenté d'aller voir ailleurs, sauf à rencontrer un besoin primaire non satisfait. La qualité n'étant pas un besoin primaire, on assiste donc au nivellement par le bas. Chacun des trois premiers a ou a eu un monopole : MicroSoft c'est la distribution, Real a eu à une époque celui des flux sur le net, et Quicktime à travers les bandes-annonces et celui en train de se constituer avec l'iPod. Au final, la médiocrité devient la norme, et les très bons logiciels, même gratuits, ne sont plus assez connus. C'est un processus somme toute normal dans une économie de marché, mais la jeunesse de l'informatique grand public nous avait un peu préservé jusqu'à la fin du siècle dernier.